«Si Jean-Marie courait aussi vite que je l’emmerde, il serait tellement loin
Avant je les détestais, mais aujourd’hui je les aime tellement moins»
Un des roi de la punchline, pas un rappeur, un lyriciste, rois des mots, visionnaire, rappeur diplômé, bref tant de qualificatifs pour parler d’un poète urbain qui a marqué les années 90. Cette semaine, il aurait pu être sujet d’un rappeur américain, d’un «keith Murray», de «Das Efx» de «GrandPuba», mais pourquoi quitter la France quand ce pays contient autant de talent. Née sur la rive droite de Paris, mais aucunement de droite, «Fabe» arrive dans le rap en 1990 et tire sa révérence 10 ans plus tard, mais laisse derrière lui des albums phares.
Il est l’un de ses rares rappeurs ayant laissé traîner ses neurones sur les bancs de l’Université au même titre que «Youssoupha» et «Ékoué». Ça ne fais aucunement de lui un meilleur artiste, mais un lyriciste magnant les mots avec arts. 5 albums en 10 ans, 3 albums phares, un album classique. 1995, premier album: «Befa surprend ses frères» avec un classique dont tout le monde se souvient : «Ca fais partis de mon passé». Ambiance Jazzmatazz, Gangstarr dans l’instru, le titre est clippé et tourne sur les chaînes de télé malgré sa forme édulcorée peut-être à cause des cuivres et de ce côté relax, mais dans le fond on commence à connaître la plume incisive de Befa.
«En vérité, j’ai eu mon bac pour ma maman, concrètement dans ma vie aucun changement (du vent)
et tous les jeunes ne vous diront ça, le baccalauréat s’est fait pour rassurer la mi-fa»
Fabe commence par faire des concerts un peu partout dans la France sans vraiment réfléchir à un plan de carrière pour le futur. De Paris à Marseille pour une intervention d’à peine quelques minutes, maison de jeunes, salles des fêtes, soirées, radios associatives, festivals de banlieue, tout était bon à prendre. Après une ou deux années à écumer Paris et sa banlieue, premier contrat signé. Premier maxi signé chez «Unik Records», label des Lausannois «Sens unik». S’en suit un morceau phare aux couleurs de l’été à la sauce Sens Unik sur leur premier album «Chromatic» en duo avec Fabe «Je veux des vacances».
Fabe a toujours considéré le rap comme une tribune, une arme à affûter pour le champ de bataille et ça se retrouve sur son deuxième album deux ans plus tard «le fond et la forme» toujours chez Unik Records. La plume est plus incisive que sur le premier. L’album est composé de morceaux plus directs, plus bruts. Pour remettre le disque dans le contexte de l’époque, Jacques Chirac, homme politique de droite est président de la République française depuis 1995, pour Fabe le ton est donné avec le titre «Lettre au président».
«Allo ouais, passe-moi Jacques, s’il-te plaît
Fabe, ouais, ce n’est pas grave, tu lui diras que j’ai écrit une chanson pour lui».
«Des Durs, Des Boss… Des Dombis !» est également une pièce maîtresse de ce deuxième album au point d’être clipé. On y retrouve des membres du collectif «Scred Connexion» auquel Fabe a fait parti jusqu’en 2000. Justement il participe juste a la première compilation du collectif intitulé «Scred Selexion 99/2000». Dans le titre Des Durs, Des Boss… Des Dombis ! donc, le rappeur exprime une certaine amertume pour le milieu du rap et parle également de la manière dont l’opinion publique perçoit ce genre musical urbain réservé aux gens de la France prolétarienne n’ayant pas forcément le droit à la parole.
Justement en 1995 en pleine promotion de son premier album, Fabe fait un passage assez remarqué à l’émission de variétés «taratata» en s’attirant les foudres jusqu’à quitter le plateau au tout début de son entrevue. En gros, il trouve inappropriée la manière dont «Robert Charlebois» et le présentateur «Nagui» se moquent du rap. Plus tôt dans l’émission, l’artiste canadien avait imité un morceau de rap, ce que Fabe a trouvé très caricaturale voir rabaissant. S’en suivent un débat mouvementé et une déclaration assez méprisante du présentateur rabaissant en pleine face de Fabe le rap. Il quitte le plateau au bout de 6 minutes.
1998, le rap français a pris confiance en lui, «Cut Killer» se fait remarqué de plus en plus avec ses complications et Fabe remet les pendules à l’heure avec un album de qualité «Détournements de son». «Les Inrocks» le qualifient d’album de la maturité. On y retrouve des morceaux classiques comme «L’Impertinent», instru rondement produit, punchline sur punchline l’artiste est très fort pour imager ses morceaux . Il serait un scénariste hors du commun.
«L’impertinent, celui qui écrit une lettre au président
Le mec qui a du sang-froid, que tu sens froid et distant».
S’en suit un dernier album en 2000 «La rage de dire» qui fait peu de bruits et qui tombe vite dans les oubliettes. Fabe quitte le monde du rap français, vient vivre à Montréal et se convertit à l’Islam. Il tient un blogue ou il s’exprime de temps en temps et souligne le fait que pour lui le rap s’est fini.
Blogue de FABE http://9mai1971.blogspot.ca/
https://www.youtube.com/watch?v=716ylmiqXqI